Au boulot, j’ai un collègue qui chante dans le bureau, qui raconte des histoires, qui fait des imitations diverses et variées, etc. Parmi ses pseudos sketches, il imite les accents belges ou sénégalais, ceux du Nord ou du Sud, et bien sûr… les bègues ! Au début, cela m’était un peu insupportable, vous vous en doutez bien, et surtout je me disais : « Mais, il est con ou quoi, il ne se rend pas compte qu’il risque de me faire de la peine ? ». Et puis, passé le temps de la révolte, une fois les poils moins hérissés, est venu le temps de la réflexion…
Pourquoi certaines personnes apprécient d’imiter les bègues, même en l’absence de public ? En tirent-elles un certain plaisir ? On pouvait, à la base, se dire que cela les rassurait sur leurs propres capacités orales, puisque maîtrisant l’infirmité des autres ! Cependant, d’autres cas éclairent cette approche d’un jour nouveau… Ainsi, on retrouve au sein de certaines chansons, notamment dans certaines de Marilyn, comble de l’ironie, des suites de sonorités qui ne sont pas sans rappeler le bégaiement. Ainsi en est-il des « Poupoupidou » et autres « Koukouketchou » ! Ces pseudo paroles sont plus des rythmes que des sons, et font écho aux sens les plus primaires de l’être humain…
On retrouve également ainsi ces répétitions dans certaines musiques hip-hop, de nombreux raps et, bien sûr, beaucoup de mélopées africaines qui se dansent plus qu’elles ne s’écoutent, qui se vibrent du corps plus qu’elles ne se chantent ! Ce rythme répété, agréable, par à-coups, que d’aucuns ont associé à la cadence sexuelle, serait-il générateur de plaisir et le bégaiement pourrait-il avoir été conservé au cours des longs siècles de sélection naturelle car lié à certaines aires de plaisir ! Ce rythme étant également fortement lié à la musique et donc, au chant, cela trouverait-il sa confirmation dans le fait que les bègues ne sont soumis à aucun problème lorsqu’ils chantent ?
Enfin, qui dit chant, musique, rythme, dit oreille ! Et dans le petit monde du bégaiement, qui dit oreille, dit Tomatis ! Ce thérapeute que j’ai eu l’occasion de fréquenter dans ma jeunesse, parait-il avec un certain succès, mais bon pas très durable apparemment pour ce qui me concerne, associe directement le bégaiement et le fonctionnement de l’oreille ! Aurait-il vu juste ? Est-ce plus cérébral qu’auditif ? Est-ce le rythme ou la mélodie qui compte ? En tout cas, le bégaiement a été sélectionné pour survivre au travers des siècles, peut-être pas pour notre plus grand plaisir, mais certainement pour celui des humoristes et de leur public !